Depuis quelques années, le sport féminin semble avoir le vent dans les voiles. Les
Jeux olympiques de Paris en 2024 ont été les premiers de l’histoire à atteindre
la parité de genre, permettant à un nombre égal de femmes et hommes athlètes de
briller sur la scène internationale. Plus près de chez nous, la nouvelle Ligue
professionnelle de hockey féminin connaît un succès retentissant, ayant attiré
plus d’un million de spectateurs depuis son lancement en janvier 2024.
Mais malgré ces récentes avancées, l’égalité de genre dans le domaine du sport est
encore loin d’être acquise. Nous aborderons ici les nombreux progrès qui
restent à réaliser, notamment en matière de couverture médiatique et de
financement du sport féminin ainsi que de lutte contre les violences faites aux
femmes en contexte sportif.
Un traitement médiatique déséquilibré
Selon un rapport de l’agence Wasserman, la part de la couverture médiatique sportive
consacrée au sport féminin (incluant télédiffusion, articles de journaux et
publications sur les réseaux sociaux) a presque triplé dans les dernières
années. Celle-ci est en effet passée d’un peu plus de 5 % en 2019 à 15 %
en 2022. S’il s’agit là d’une amélioration notable, cela demeure peu
considérant que les femmes constituent environ 40 % des personnes
pratiquant régulièrement un sport, tous niveaux confondus.
Par ailleurs, les événements sportifs féminins sont souvent programmés à des
horaires moins prisés que ceux des compétitions masculines. Par exemple, la
chaîne de sport ESPN a choisi de diffuser le match de championnat de basketball
féminin universitaire de 2024 en dehors des heures de grande écoute. Le même
événement avait pourtant connu un franc succès médiatique l’année précédente, ayant
attiré près de 10 millions de téléspectateurs.
Enfin, le traitement médiatique accordé au sport féminin tend à perpétuer des
stéréotypes de genre. Alors que les commentateurs et journalistes s’intéressent
surtout aux performances sportives des athlètes masculins, les athlètes
féminines voient souvent leur apparence physique et leur vie personnelle
scrutées à la loupe, leur statut de sportive professionnelle étant éclipsé par
leur identité de femme.
Moins d’argent pour le sport féminin
Les activités sportives féminines bénéficient généralement d’un financement moins
élevé que leurs équivalents masculins. Selon un rapport de la National
Collegiate Athletic Association (NCAA), bien que le nombre de femmes
compétitionnant au niveau universitaire soit en constante augmentation aux
États-Unis, les ressources allouées aux programmes masculins étaient plus de
deux fois supérieures à celles accordées aux programmes féminins en 2020.
Une telle inégalité en matière de financement se traduit par des conditions de jeu
et d’entraînement sous-optimales pour les équipes féminines. Celles-ci doivent
notamment composer avec des installations de moindre qualité, des plages horaires
de second choix, des entraîneurs moins qualifiés et impliqués dans leur
développement ainsi que des équipements et uniformes parfois désuets.
L’ancienne joueuse de l’équipe de France féminine de football Mélissa Plaza
rapporte que ses coéquipières et elles ont souvent dû se contenter des
« restants » laissés par l’équipe masculine, allant jusqu’à devoir
porter des chaussettes trop grandes faute de budget pour en acheter des neuves !
La valeur inférieure accordée au sport féminin se reflète également dans les écarts
salariaux entre sportives et sportifs professionnels. Pour ne donner qu’un
exemple, selon le directeur du think thank Sport et Citoyenneté Julian
Jappert, le salaire moyen d’un joueur de la National Basketball Association
(NBA) serait 110 fois supérieur à celui d’une joueuse de la ligue féminine
équivalente (WNBA).
Plus généralement, selon un rapport de l’organisme Parity Now, 58 % des athlètes
féminines tirent moins de 25 000 $ de revenus annuels de leur carrière
sportive, et 74 % d’entre elles exercent un emploi en parallèle de celle-ci. En
plus de leur causer un stress financier important, cette situation affecte leur
capacité à performer au meilleur de leurs habiletés et les expose à un risque accru
d’épuisement et de blessures, en les empêchant de bénéficier d’un repos adéquat
entre leurs performances.
Violences en contexte sportif
De nombreuses femmes sont victimes de violence dans le milieu du sport, que ce
soit en tant qu’athlètes, entraîneuses, journalistes, thérapeutes, arbitres, ou
même en tant que fans. Plus spécifiquement, près de 21 % des athlètes
professionnelles féminines rapportent avoir vécu des abus sexuels en contexte
sportif durant leur enfance, contre 11% des athlètes masculins.
Un rapport publié par l’ONU révèle que les mécanismes conçus pour protéger les
filles et les femmes contre la violence sexuelle en milieu sportif sont souvent
sous-financés et peu efficaces. Ils s’avèrent même fréquemment ignorés par les
institutions sportives, qui prennent pourtant au sérieux les mesures visant à
prévenir d’autres délits, tels que le dopage ou le trucage de matchs.
Les violences vécues par les athlètes féminines sont même parfois commises avec la
complicité tacite des organisations sportives, qui tâchent d’étouffer les
allégations d’abus afin de protéger leur réputation. C’est ce qui s’est produit
lors du récent scandale impliquant la fédération américaine de gymnastique, qui
a mis au jour une série d’abus sexuels touchant plus de 300 gymnastes,
principalement mineures lors des événements, s’étant étendue sur plus de deux
décennies.
En plus des violences auxquelles elles sont confrontées sur le terrain, les femmes
athlètes sont également plus à risque d’être victimes de cyberviolence, soit de
harcèlement ou de discours haineux en ligne. Toujours selon l’ONU, plus de 30 %
des athlètes féminines d’élite rapportent avoir vécu une forme sérieuse de
violence virtuelle, et 85 % des cas de cyberviolence survenus lors des
Olympiques de Tokyo en 2021 étaient dirigés contre des femmes.
Plus récemment, le cas de la boxeuse algérienne Imane Khelif, médaillée d’or aux
Jeux olympiques de Paris en 2024, a fait couler beaucoup d’encre. Considérée
« trop masculine » pour affronter d’autres femmes sur le ring,
l’athlète a été victime d’une campagne diffamatoire en ligne remettant en
question son sexe biologique. Ce cas illustre la violence du traitement réservé
aux sportives qui, lorsqu’elles performent au-delà des attentes liées à leur
genre, sont sanctionnées pour ne pas correspondre aux normes de la féminité.
Un combat à poursuivre
En bref, un travail considérable reste à accomplir pour parvenir à une réelle
égalité de genre dans le domaine du sport, que ce soit en termes de
représentation médiatique, de valorisation monétaire du sport féminin ou de
lutte contre les violences.
Il apparaît donc essentiel d’agir collectivement pour soutenir les athlètes
féminines, promouvoir des politiques équitables et sensibiliser le public à ces
enjeux. Ensemble, nous pouvons contribuer à créer un environnement sportif plus
juste et sécuritaire pour toutes.
Rédigé dans le cadre du cours RED3000
Remis le 29 avril 2025
Références
INTERNATIONAL OLYMPICS COMMITTEE. #GenderEqualOlympics:
Paris 2024 making history on the field of play, 28
juillet 2024.
PROFESSIONAL WOMEN’S HOCKEY LEAGUE. Professional Women’s Hockey League (PWHL) surpasses one million fans all-time, 16 mars 2025.
DARVIN, Lindsey. Media Coverage For Women’s Sports Has Nearly Tripled In Five Years, According To New Research, Forbes, 31 octobre 2023.
UNESCO. Gender Equality in Sports Media, 4 janvier 2023.
THE ASSOCIATED PRESS. A new NCAA report show the stark gap in funding for women’s sports, NPR, 24 juin 2022.
WOMEN’S SPORTS FOUNDATION. Do You Know the Factors Influencing Girls’ Participation in Sports?, s.d.
FEDERICO, Ilaria; Mario Bowden; Stéphane Hamalian. Gender inequality in sport: The challenges facing female athletes, Euro News, 27 juillet 2023.
PARITY NOW. Beyond the Game: Exposing the Economic Realities of Professional Women Athletes, décembre 2024.
UN WOMEN. Facts and figures: Women in sport, Juillet 2024.
WIKIPEDIA, USA Gymnastics sex abuse scandal, 17 février 2025.
THE ASSOCIATED PRESS. Olympic boxing champ Imane Khelif files lawsuit for cyberbullying against her, Global News, 14 août 2024.
