Par Jamila Taleb
Le métier du journaliste de la presse écrite a énormément changé aujourd’hui. Les salariés et pigistes confirment que le virage numérique a fait éclater les frontières entre l’écrit et l’image.
Chercher des savoirs techniques et technologiques en vue de développer un savoir-faire polyvalent est une nécessité. En plus d’être en mesure de faire preuve d’un savoir-être réfléchi sur les réseaux sociaux. La compression économique due à la crise des médias n’a pas fini de pétrir des femmes et des hommes pour modeler le métier des journalistes.
Le savoir fondamental
Suivre une formation collégiale ou universitaire, avoir une belle plume, un esprit curieux et une bonne capacité d’analyse sont la base du métier du journalisme.
Aujourd’hui, il y a unanimité sur le fait que la première compétence recherchée est la polyvalence. Autrement dit, un journaliste de la presse écrite doit, en plus de déployer ses capacités rédactionnelles, manier la caméra et photographier ses sujets.
Savoir faire
Le journaliste qui s’arrête à produire un texte manuscrit seulement fait partie du musée du journalisme. Désormais, le journaliste doit exécuter une multitude de tâches. Écrire son sujet, capter une photo qui s’y rattache ou bien tourner une petite vidéo de support qu’il doit pouvoir monter avant de la livrer. Il doit travailler différemment en fonction des besoins des nouvelles plateformes.
Un exemple-type de tâches pour un journaliste qui fait une entrevue. Il prépare et mène son entrevue, produit du matériel pour monter un balado, prend une belle photo qu’il peut partager sur les médias sociaux, tourne une mini-vidéo accompagnée d’un pitch pour annoncer à ses followers ou amis la sortie prochaine de l’entrevue.
Le journaliste d’aujourd’hui réfléchit en multi-livrables (l’article et la photo pour le journal papier, le balado pour le support numérique, la vidéo pour le média numérique ou les réseaux sociaux, le pitch pour le média en ligne ou pour son propre compte de réseaux sociaux, etc.)
Et ce n’est pas fini. Après la publication, le journaliste peut aussi continuer à répondre aux commentaires et réactions du lectorat, en particulier, quand le sujet est polémique ou touche un nerf sensible de la société.
Il ne faut pas en conclure que c’est la règle pour tous les jours. Chaque journaliste en fonction de ses choix, de ses positions, de ses sujets se situe par rapport aux enjeux de la multitude des plateformes, mais force de constater est que tous, qu’ils soient salariés ou pigistes, déploient des efforts supplémentaires et travaillent différemment.
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Savoir être
Avant, les occasions de contact entre le journaliste et son public étaient très limitées. Rares sont les moments où il était invité dans un studio radio ou sur un plateau TV pour commenter l’actualité ou se prononcer sur un fait sociétal. Souvent, l’exercice demeurait bien encadré et limité dans le temps.
Aujourd’hui, le journaliste est exposé au public directement. Il doit réfléchir à sa propre démarche. Et c’est loin d’être une question banale, car le savoir-être est une compétence très importante dans un monde d’interaction directe et instantanée avec le public.
Aller sur scène devant le public n’est guère un choix pour plusieurs journalistes. Ils sont contraints de se plier à cet exercice énergivore et absorbant pour entretenir leurs réseaux, être visibles et maintenir des relations avec leurs sources ou leur lectorat.
Plusieurs journalistes le confirment, les réseaux sociaux est un monde sans gants blancs. La critique est acerbe, ouverte et personnelle. Le journaliste doit développer une carapace pour se protéger des effets nocifs qui peuvent venir à bout de son mental ou même de son psychisme.
Le journaliste d’aujourd’hui doit posséder des savoirs variés en plus de sa formation initiale. Il évolue dans un contexte pauvre en ressources d’appui ou de soutien. Il lui incombe de développer une façon de se comporter sur la toile.
Tous les journalistes s’accordent que le modèle du journaliste d’aujourd’hui est en perpétuel métamorphose et que le métier n’a pas fini de se transformer. La situation se justifie au moins par deux raisons : premièrement, les coupures dans les journaux pour des raisons économiques sabrent dans les ressources; et deuxièmement, la multitude des plateformes exige de présenter un contenu varié : de l’écrit, de la photo et de la vidéo pour attirer le public et les clics.
Concrètement, les journalistes de la presse écrite, en plus de travailler fort, se débrouillent pour suivre des formations sur le tas ou des autoformations pour réussir à faire partie du journalisme d’aujourd’hui.
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SIMON VAN VLIET
Journaliste indépendant depuis 2012, président de l’Association des journalistes indépendants du Québec (AJIQ) et reporter sur le Plateau pour Pamplemousse.ca depuis 2015, Simon Van Vliet est l’un des co-entrepreneurs à l’origine de la relance de Pamplemousse, dans le cadre d’une transition vers un modèle d’économie sociale.
Ses œuvres écrites ou audiovisuelles ont été publiées ou diffusées autant par des médias alternatifs ou spécialisés que par des médias grands publics francophones et anglophones, dont l’Associated Press Television News, Discovery Channel, Le Devoir, Le Nouvel Observateur, Planète F Magazine, La Revue Quatre-Temps et Vice News Canada.
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